Ça me gruge les organes, c’est comme si des dents me poussaient dans le ventre. Mes mots sont à vomir, ils ne tiennent pas debout, prennent trop de place, s’allongent dans ma bouche. Vous ne savez pas entendre le vent. Mon souffle est un sirocco et vos oreilles sont remplies de ciment. Vos visages me disent que j’ai une haleine de soufre lorsque je parle de tout ce qui me pourrit: ma langue sous terre, les phrases en forme de cimetière, mon goût développé pour la poussière. Ma mâchoire craque dans des sourires infinis de fausse piété. J’ouvre la gorge, la laisse boire vos paroles, grimace: une saveur d’alcool. Je tire une langue invisible à toutes ces phrases sensibles.
Mes pensées sont un brouillard qu’on n’ose pas traverser: je rafale les lettres comme elles ont commencé. Je suis un ouragan dont vous ne voulez que la brise. Il faudrait vous coudre les paupières pour vous forcer à entendre avant que mes paroles ne se pendent.
Les deux textes présentés dans cette section sont issus d’un événement intercollégial intitulé Premières impressions. Il s’agit d’une rencontre annuelle, organisée par le Cégep de Saint-Jérôme, au cours de laquelle les étudiantes et étudiants provenant de divers cégeps à travers le Québec prennent part à une fin de semaine d’activités littéraires et artistiques. Ils et elles peuvent alors partager leurs bonnes pratiques d’édition, rencontrer des artistes et des artisans qui leur offrent des conférences et des ateliers, produire une revue collective pendant une nuit de création littéraire et artistique, puis assister à un gala où les meilleurs textes, les meilleures œuvres et les meilleures publications sont récompensés par la remise de trophées et de bourses totalisant une valeur de 2750 $. Ces bourses sont offertes grâce au programme Promotion de l’enseignement collégial: productions étudiantes du ministère de l’Enseignement supérieur.
L’équipe de Lettres québécoises est partenaire de cet intercollégial depuis deux ans et contribue, par son expertise, à la création de la revue Premières impressions, en plus de siéger au jury des prix «apostrophées» décernés lors de l’événement. Ainsi, au cours de la fin de semaine du 21 au 23 avril 2023, Alexandre Vanasse (éditeur), Nicholas Giguère (directeur du cahier Critique) et Mégane Desrosiers (responsable des communications et de la promotion) ont rencontré plus de 75 étudiant·es et les ont accompagné·es dans leur processus de création et d’édition. L’équipe de LQ s’inscrit de la sorte dans son mandat dont l’objectif est de transmettre ses savoirs aux plus jeunes et de mettre en valeur les textes de la nouvelle génération d’écrivains et d’écrivaines. Vous trouverez donc ici les premiers prix pour les catégories «Meilleur texte en prose» et «Meilleur texte poétique», signés par deux auteur·rices en herbe, tous·tes deux issu·es du Cégep du Vieux Montréal… signe qu’il y a là-bas un terreau fertile pour la création littéraire!
