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Plus que des cendres, une trace amoureuse

Plus que des cendres, une trace amoureuse
Dossier

jp

De passage à New York en 1996, Jean-Paul Daoust m’a écrit une dédicace sous le titre 111, Wooster Street: «Là où cette ville, à la mesure de ma démesure, m’a offert ces poèmes qui cognaient à ma fenêtre. Que j’ai ouverte of course. Tendresses.» Je retrouve ici l’audace volontaire du poète, son désir conscient de nous en faire voir de toutes les couleurs, pour aller au fond des choses sans faux-fuyants ni pudeur, pour dire l’emprise des émotions et le spectacle du monde, aussi exaltant ou ravageur qu’il soit. Depuis des années, j’admire le courage d’une poésie parfois virulente mais jamais arrogante, aux bras grands ouverts, où affleurent la fragilité et l’humilité, même dans ses sursauts incisifs. Même dans ses insouciances à l’envers. Si Annie Ernaux met de l’avant «sa race» avec force dans son discours de Stockholm, Jean-Paul Daoust est d’une fidélité tout aussi impétueuse à lui-même et à sa race, à son histoire et à sa singularité, à son parcours d’exception. Il peut être ludique, rire aux éclats dans les débordements de la langue, sa franchise reste périlleuse pour lui d’abord. Lorsqu’il dénoue la douleur, j’imagine encore avec lui que «la lumière rugit quand le soleil part». La beauté de l’homme et de sa poésie tient à l’espoir de toucher l’autre à vif. D’y laisser plus que des cendres, une trace amoureuse.

 


Madeleine Monette a signé plusieurs romans dont Les rouleurs, repris à Paris puis à Montréal sous le titre Skatepark; et deux recueils de poésie, Ciel à outrances et La mer, au feu / A Sea Fire. Un recueil d’essais, L’Amérique est aussi un roman québécois. Vues de l’intérieur, vient de paraître. Elle est membre de l’Académie des lettres du Québec et du Parlement des écrivaines francophones.

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